Journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etat français et en hommage aux Justes de France

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Discours prononcé le 20 juillet 2014 à la Mairie de Bordeaux:

« Monsieur le Préfet, Madame la conseillère régionale, Monsieur le Général, Madame la Présidente de la LICRA, Monsieur le Président du CRIF, Mesdames et Messieurs,

C’est avec une profonde émotion que je représente aujourd’hui Alain Juppé et que je participe, à vos côtés, à cette journée nationale dédiée à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etat français et à l’hommage rendu aux Justes de France.

Cette journée de commémoration est l’occasion pour la Ville de Bordeaux de rendre hommage aux victimes : aux Juifs de France, aux tsiganes, aux handicapés, aux homosexuels, aux slaves, aux noirs dont nous avons le devoir de nous souvenir afin de ne pas les vouer à une deuxième mort que serait l’oubli.

Elle est aussi l’occasion de s’associer à la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat français dans les crimes perpétrés le 16 juillet 1942 lors de la rafle du Vel’ d’Hiv’. Ce jour-là fut l’un des drames les plus terribles de notre Histoire qui nia toutes les valeurs qui fondent et font la France. « Ce jour-là, la France, patrie des Lumières et des droits de l’homme, terre d’accueil et d’asile, accomplissait l’irréparable » pour reprendre les mots du Président Chirac. Ce jour-là, ce sont en effet 13 152 arrestations qui furent opérées, et autant de vies humaines qui basculèrent vers l’horreur des camps de la mort dont seulement une vingtaine de personnes reviendront en vie. Pas un seul enfant. La rafle du Vel’ d’hiv mais également les lois scélérates de l’Etat français, et la main forte prêtée par le régime de la collaboration à la mise en œuvre de la solution finale, restent une tâche indélébile dans notre conscience nationale. Une injure faite à la France, à son histoire, à sa nature, à sa vocation.

Face au déferlement de la haine, de l’horreur et de la barbarie, il y eut aussi, et fort heureusement, la tolérance, la solidarité et l’humanité. Des hommes et des femmes qui ont su garder leur conscience et qui ont montré que nos valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité n’étaient pas mortes. Des exemples de courage qui furent des remparts contre l’ignominie. Cette journée commémorative est aussi l’occasion pour la Ville de Bordeaux de s’associer à la reconnaissance témoignée par la Nation à ces « Justes de France » qui ont, parfois au péril de leur propre vie, protégé, défendu ou recueilli des hommes, des femmes et des enfants recherchés par la police française et les Allemands.

Bordeaux n’a pas été épargnée par l’horreur de la guerre. Rappelons qu’il y a 70 ans, un convoi de déportation à destination de Drancy partait de Bordeaux, emmenant avec lui 365 personnes dont les deux tiers allaient être assassinées à Auschwitz. Le 12 janvier 1944, ces hommes et ces femmes, ces enfants et ces vieillards, étaient arrêtés chez eux, à Bordeaux et dans sa région, internés à la Grande Synagogue de Bordeaux avant d’être déportés vers les camps de concentration et la mort. Cette rafle ne fut pas la première, ni la dernière. Au total, ce sont 1681 personnes qui furent déportées entre 1942 et 1944. Parmi elles, comment ne pas évoquer alors que nous sommes aujourd’hui en ces murs, Joseph Benzacar, juif d’origine portugaise, premier adjoint au Maire de Bordeaux Adrien Marquet, collaborationniste qui ne fera rien pour le soustraire à la déportation et à la mort.

La mémoire, qui nous rassemble aujourd’hui, témoigne de la volonté de notre ville et de notre pays de ne pas oublier. Pendant trop longtemps la France a tenté d’enterrer cette histoire, son histoire : on ne voulait pas savoir, on ne voulait pas parler, le plus souvent par honte, de ce régime de Vichy entièrement dévoué au service de l’ennemi, à son idéologie, à son racisme d’Etat. Mais la mémoire est indispensable pour notre société : c’est un devoir de vérité. Un devoir qui permet d’enseigner les leçons du passé et de les juger. Un devoir qui est surtout tourné vers l’avenir, essentiel pour fédérer et unir un peuple ou plutôt, des peuples. Un devoir fondamental envers les jeunes générations qui est parfaitement rempli par les associations, les historiens, les enseignants… dont je souhaiterais ici saluer tout particulièrement le travail. Oui, la mémoire est en réalité plus qu’un devoir, elle est un travail qu’il nous revient de mener à bien de façon continue pour la perpétuer et la transmettre.

Mais en ce jour de commémoration, il ne s’agit pas seulement de nous souvenir, d’honorer, d’expliquer. Il nous faut rappeler la nécessité de combattre avec la plus grande fermeté toutes les formes d’antisémitisme, de racisme, de xénophobie, d’homophobie, contraires à l’esprit de notre République et qui sont encore malheureusement bien présentes dans nos sociétés.

Je vous remercie. »

Marik Fetouh

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