Dernière étape du programme des visiteurs internationaux, New-York ne se comprend ni ne se visite en seulement 3 jours. Mais il est possible d’en saisir l’esprit de liberté qui y règne. Nous avons commencé par une visite à l’ONU, sur le thème des droits des femmes. Réunion intéressante bien qu’un petit frustrante, car plutôt générale. Nous avons cependant appris l’existence d’une labellisation pour devenir une « safe city », qui valorise l’aménagement public favorisant le sentiment de sécurité des femmes. J’ai demandé à recevoir rapidement plus d’informations à ce sujet, afin de voir si on peut développer cela à Bordeaux.
Direction ensuite l’ONG Religions for Peace, présente dans 90 pays dont la France, et accréditée auprès de l’ONU. Comme son nom l’indique, il s’agit d’acteurs religieux du monde entier, qui œuvrent pour la paix au travers d’actions en faveur du désarmement, du développement économique, de la cohésion sociale ou encore de l’environnement. Lors de cette réunion, contrairement à l’ONU, nous avons eu des exemples très concrets sur leur action en Birmanie pour apaiser les tensions entre bouddhistes et musulmans, et en Tunisie pour lutter contre la radicalisation.
Réunion à la mairie de New-York également avec la directrice du service en charge des communautés : 60% des habitants de la ville sont en effet migrants ou enfants de migrants et plus de 200 langues y sont parlées, ce qui nécessite des moyens importants pour assurer la traduction. En effet, il n’y a pas de langue officielle aux Etats-Unis. Les objectifs de cette direction sont de favoriser l’accès à la justice en diminuant les freins économiques, de favoriser l’inclusion sociale à tous les niveaux en tenant compte des différentes cultures des habitants, et de plaider avec une centaine d’autres villes pour une prise en compte de ces populations dans les politiques fédérales. Le principal outil d’inclusion est une pièce d’identité délivrée par la ville, à tous ceux qui la demandent, y compris les migrants en situation irrégulière. Cette carte d’identité donne accès aux services sociaux et de santé, aux écoles et à certaines banques. New-York est également une ville sanctuaire qui se bat contre la politique de Donald Trump et l’expulsion des migrants, arguments économiques à l’appui.
Autre ONG qui vaut la rencontre : WISE pour Women’s Islamic Initiative in Spirituality and Equity. Une ONG pour le leadership des femmes en Islam, qui rassemble des centaines de militantes à travers le monde. Certaines sont très pratiquantes, d’autres totalement sécularisées. Ce qui les réunit, c’est la volonté de lutter contre le patriarcat et une interprétation dénaturée du Coran. En effet, de nombreuses pratiques, comme l’excision ou la tutelle de l’homme sur sa femme, sont issues de la tradition et non de la théologie musulmane. Ces femmes mènent donc un travail fondamental d’exégèse des textes religieux pour différencier la coutume de la Sunna, dans une visée féministe. Un autre exemple est le port du Hijab, qui n’est pas du tout une prescription religieuse, le Coran se bornant à prôner une certaine pudeur. WISE a exactement la même approche que celle de l’imam de Bordeaux Tareq Oubrou. Un de leur axe de travail porte sur les notions islamiques dévoyées par Daesh, avec à la clef une application qui permettra de savoir si on est face à un discours traditionnel ou radical. L’action de WISE est primordiale : c’est de l’intérieur que l’Islam peut évoluer.
Bien entendu, on ne peut pas aller à New-York sans se recueillir au mémorial du 11 septembre. A l’emplacement exact des tours jumelles, il y a deux bassins, avec les noms des près de 3000 victimes gravées sur le rebord. L’eau qui s’écoule symbolise le sang des victimes et les larmes des familles. Autres lieu de mémoire incontournable : le Stonewall In. Il s’agit du bar fréquenté par la communauté LGBT où un énième raid de la police en 1969 déclencha des émeutes. Les habitants étaient excédés par l’homophobie et la transphobie des autorités et tout le quartier se rebella contre les forces de l’ordre. Cet événement est fondateur du mouvement pour les droits civiques LGBT, aux Etats-Unis et dans le monde entier. Il est commémoré chaque année dans de nombreuses villes, au travers des Marches des Fiertés LGBT.
Comme San Francisco, Minneapolis et Washington, New-York est une ville cosmopolite, ouverte et tolérante. C’est une ville sanctuaire, pour qui l’immigration est une chance et non un problème. Naturellement, l’immense majorité des habitants vote démocrate. Un contraste saisissant avec les zones moins peuplées, qui ont largement voté pour Donald Trump. Les Etats-Unis sont de plus en plus clivés entre les grands centres urbains, qui sont des bulles de tolérance, et les Etats peu peuplés, en particulier ceux du Sud, où les habitants sont hostiles aux migrants et aux minorités. Un phénomène que l’on constate également en France, même s’il est moins marqué